Par chance, au cours de cette saison, les conditions favorables étaient réunies dès le début des semailles. Avec une pluviométrie très généreuse tout au long de l’année, les agriculteurs et les céréaliers en particulier ont été choyés. L’abondance des précipitations et leur répartition à travers tout le pays ont annoncé les prémices d’une bonne récolte.
Mieux encore, les importantes quantités d’eau stockées dans les barrages ont eu un impact très positif sur la psychologie des agriculteurs dans la mesure où elles les rassurent sur le proche avenir et sur les autres productions. C’est ainsi que les superficies irriguées n’ont pas eu recours, comme pour les années précédentes, à l’eau des barrages (donc des économies non négligeables au niveau de la facture).
Bien sûr, nos besoins ne seront pas, tout à fait, assurés. L’autosuffisance n’est pas pour demain. Toujours est-il que la campagne actuelle pourra contribuer à réduire les importations et, par conséquent, laisser de côté quelques devises. Nos importations se monteraient, en effet, à près de 600 milliards de millimes. Ce sont, surtout, des pays de l’Europe de l’Est qui nous fournissent en céréales et, en particulier l’Ukraine et la Roumanie. La France vient en troisième position.
Autosuffisance alimentaire
Pouvons-nous parler de l’éventualité d’assurer, un jour, notre autosuffisance en cette matière stratégique ? La question pourra être, toujours, soulevée tant qu’une réelle politique concertée allant dans ce sens n’aura pas été mise en œuvre. Il n’est pas question de formuler des vœux, mais d’engager une action effective de mobilisation des moyens et des volontés. Ce n’est que grâce à une concertation poussée avec toutes les parties intervenantes que l’on pourra parvenir à esquisser les grands contours d’une véritable stratégie nationale en matière d’autosuffisance alimentaire.
Bien des problèmes resteront en suspens dans un secteur qui souffre de plusieurs carences structurelles. La gestion par trop traditionnelle qui prévaut, les retards dans la mécanisation, la parcellisation des surfaces cultivables, l’endettement chronique de nos petits agriculteurs, l’absence d’encadrement de la part des structures professionnelles, etc. resteront autant d’obstacles devant la modernisation de ce secteur.
Pourtant, les enjeux sont de taille. Et ce n’est pas, uniquement, à l’Etat de mener ce combat. Tous ceux qui se sentent concernés par l’avenir de l’agriculture sont les premiers à mettre la main à la pâte loin de toute polémique ou démagogie.
Pour l’heure, les préoccupations les plus immédiates concernent le bon déroulement de la campagne céréalière. Après le mois de Ramadan, les agriculteurs se sont remis au travail pour assurer une bonne moisson et compenser, un tant soit peu, les pertes des trois dernières années.
La vigilance de rigueur
Certes, ils ne placent pas la barre de leurs espoirs très haut. Tout au plus, cherchent-ils à atténuer l’impact des caprices de la nature des saisons écoulées. Les dangers guettent encore le secteur. Les incendies (en particulier ceux qui sont causés par une main criminelle) menacent, sérieusement, les champs et hypothèquent l’avenir de la récolte. La vigilance est, donc, de rigueur.
Il s’agit de se mobiliser pour préserver le travail de toute une année et l’amener à bon port. D’où une plus grande attention à accorder à la surveillance des champs qui n’ont pas encore été moissonnés et à l’entretien du matériel utilisé. Les centaines d’hectares qui partent en fumée chaque année ne peuvent que remotiver nos agriculteurs.
C’est à partir de cette période que le rôle des structures corporatistes se vérifie. Ces organisations professionnelles sont appelées à s’investir de façon effective pour aider les agriculteurs à bien s’acquitter de leur tâche et à parachever dans les meilleures conditions leurs campagnes de récolte. Les questions concernant les prix de la récolte peuvent être discutées sereinement avec l’Etat qui a le monopole de la collecte. Pour la campagne précédente les tarifs pratiqués étaient de 75 dinars pour le quintal de blé dur, 54 dinars pour le blé tendre et 50 dinars pour l’orge et le triticale.
Quant aux autres préoccupations liées aux coûts des matériaux utilisés (fils de fer, sacs, coût du transport…) le débat pourra être mené en temps opportun.
De tels détails sont toujours surmontables. Ils ne peuvent, en aucun cas, constituer des obstacles devant les intervenants. Les syndicalistes et autres polémistes ne doivent pas s’emparer de ces dossiers à des fins égoïstes. Seul l’intérêt du pays doit primer.
Amor CHRAIET